jeudi 15 septembre 2011

Mon premier BAPE! Partie 2

C'était ce soir la deuxième partie de l'audience du BAPE sur le Projet de poste aux Outardes à 735-315 kV et lignes de raccordement à 735 kV. Cette fois-ci, j'ai été ponctuelle; je suis partie 10 minutes à l'avance pour arriver quinze minutes à l'avance.


Comme la dernière fois, le président Pierre Fortin a débuté par présenter son équipe et rappeler les règles entourant la soirée . Il a annoncé que cinq participants s'adresseraient à la commission. Ouf!!! En lisant la documentation hier, je n'avais vu aucun mémoire de déposé et j'étais un peu inquiète de l'absence de participation écrite du public. Le rapport sera remis au ministre au solstice d'hiver et il devrait être rendu public avant la fin février.

Le BAPE a réagit aux propos relatifs à la traduction innu-français de la dernière fois, et l'avocate a assermenté un traducteur, M. Canapé (probablement pas orthographié comme cela).


C'est le Chef Raphaël Picard qui s'est adressé à la Commission en premier (en français). Il a rappelé les droits ancestraux que la communauté de Pessamit revendique, Nitassinan, des rivières Godbout à Portneuf. Il a mentionné l'absence de compensation prévue pour le projet (quoique la version d'Hydro-Québec serait sans doute qu'on a tenté d'établir un dialogue pour négocié par l'envoi répété de lettres). Il reprochait à Hydro-Québec que la seule façon de consulter, c'était de tenir informé de l'avancement du projet (plutôt que de faire de la cogestion). Il a mentionné que l'étude d'impact était divisé en phase initiale et phase ultime, ce qui ne se retrouvait pas dans l'avis de projet et qui serait illégal. Il a rappelé l'obligation constitutionnelle de consulter les Premières Nations. Il a dénoncé le fait que le MRNF aurait octroyé des permis sans le consentement des Innus. Il a contesté la délimitation de la zone d'étude. Il a nommé de nombreuses espèces qui seraient touchées et qui ne se trouvaient pas dans l'étude d'impact, soit le caribou forestier et l'omble de fontaine.


La commission lui a posé quelques questions, dont certaines requéraient une carte. Il s'est alors levé, est venu à la table des intervenants pour indiqué de quelle section de la carte il parlait (c'était bizarre! Comme s'il sortait de son personnage, en terme GN). D'ailleurs, le chef Picard est aussi sorti de son personnage et lorsqu'il est passé de la lecture de son texte aux réponses. Il a été question du banc d'emprunt (ça veut dire « la zone d'excavation d'où est extraite la terre »). M. Picard a rappelé les 13 ouvrages dans le Nitassinan, et q'il était en procédure judiciaire contre Hydro-Québec; selon lui, un tel projet n'aurait pas du avoir lieu pendant le contentieux. Il a affirmé avoir envoyé 20-30 lettres au MRNF et à Hydro-Québec mentionnant que le processus de consultation ne suivait pas le cours régulier (par contre, les lettres de son côté ne sont pas publiques!). À une question des commissaires, il a répondu que des campements étaient là depuis des millénaires, ce qui a fait rire les Innus dans la salle.

Par la suite, c'était au tour de la Chambre de commerce (François Désy) et d'ID Manicouagan (Guy Simard) de présenter leur mémoire. Ils ont rappelé la démographie en décroissance depuis une quinzaine d'années, et la contribution de la Côte-Nord en matière de ressources économiques, tout en mentionnant que la région bénéficie peu des retombées économiques de ses ressources (tiens tiens, comme Pessamit... et comme le reste du Québec, par extension avec le présent débat sur les redevances de l'exploitation minière, malgré ce que peut en dire Raymond Bachand). Ils semblaient dire que chaque projet était une négociation en soi, et voudraient la même chose que Toulnustouc. Par contre, ils auraient voulu que les communautés locales gèrent elles-même le programme de mise en valeur intégré (PMVI). En d'autres mot, ils auraient aimé pouvoir utiliser l'argent à des fins autres qu'environnementales... euh... NON! Tout à leur honneur, ils ont mis l'accent sur des énergies alternatives ou un centre de recherche en parternariat avec Hydro-Québec pour exploiter le « gisement éolien », mais ont rappelé qu'il n'y avait pas de réserve de capacité de raccordement. 


M. Jean-Marie Picard était de retour à la table des intervenants. Il est intervenu en innu, et M. Canapé traduisait après. Au début, il ne semblait pas vouloir s'arrêter pour laisser le temps au traducteur de traduire, et le président essayait tant bien que mal de le faire arrêter. Pour tout ce que disait Monsieur Picard, Monsieur Canapé en disait bien peu! Le traducteur s'est amélioré avec la pratique. Les propos de M. Picard étaient semblables à la dernière fois, mais ceux qui différaient était que si Hydro-Québec avait rencontré les MRC avant, pourquoi Pessamit à la dernière minute? Il aurait aimé que les échanges de lettres en français soient traduits en innu, et que la commission soit diffusée à la radio. Il s'interrogeait si de nouvelles lignes seraitent construites, et a rappelé qu'il aurait dû être question du territoire en général, pas seulement de la zone d'étude. Il a demandé à Hydro-Québec de rencontrer la population malgré la courte échéance du projet.

Une pause a eu lieu et j'ai rencontré une femme travaillant aux affaires publiques d'Hydro-Québec. Elle me demandait si je venais par intérêt personnel, ce à quoi j'ai répondu oui. Elle cherchait à se rappeler où elle m'avait vue, et c'était lors de l'assemblée générale annuelle de l'Organisme de bassin versant Manicouagan.


Denis Villeneuve, directeur de la foresterie chez Abitibi Bowater, est aussi intervenu de nouveau. Il a souligné que le bois récolté ne pourrait pas être certifié FSC, car la vocation du terrain changerait. Il a informé les commissaires que l'aménagement effectué sur les 74 hectares de terrain valait environ 75 000$. Le BAPE a encore demandé si Abitibi Bowater et Hydro-Québec avait discuté ensemble de cela, à quoi M. Villeneuve a répondu par la négative.


Robert Vachon (innu) est intervenu. Son discours était difficile à suivre, car il ne semblait pas structuré, mais ce qu'il a dit de mieux est que le gouvernement devrait mettre de l'argent dans l'environnement au lieu de briser la Terre, et il a rappelé que la Terre était notre garde-manger.


Jimmy Houde, un jeune innu, a suggéré d'arrêter le projet; comme le territoire est à la population, il faudrait qu'Hydro leur demande leur avis en assemblée générale (yééé démocratie participative!).


J'avais fait mes devoirs et lu toute la documentation (hormis la version complète de l'étude d'impact; j'y ai préféré le résumé). En rédaction à temps plein, je n'avais pas la volonté de rédiger un mémoire. Je m'étais dit que je ferais un mémoire verbal, mais la date limite (1er septembre) s'est envolée lors d'une visite éclair à Québec où je n'ai pas pris le temps de remplir, numériser et envoyer l'avis d'intention de faire une présentation verbale. En dernier recours, j'aurais pu m'inscrire sur la liste des intervenants sur place et avoir 10 minutes. Par contre, je me sentais très fatiguée aujourd'hui; malgré une bonne nuit de sommeil, j'ai dormi tout l'après-midi pour être en forme pour ce soir. La consigne du respect des droits d'auteur donnée par le président et l'intimidant Chef Picard ont miné ma confiance à livrer une intervention. Si je n'étais pas en mesure de citer mes documents à mesure, de bien intervenir, pourquoi se donner la peine d'intervenir?

Je suis quand même un peu déçue de moi. Vu l'absence des groupes environnementaux de la région, j'aurais dû intervenir. J'aurais d'abord remercié la commission, puis j'aurais lancé une petite craque au MDDEP afin qu'il s'inspire du BAPE pour prévenir les intervenants lorsqu'une consultation publique a lieu. J'aurais rappelé que j'avais lu la documentation dans un exercice intellectuel, en tant que candidate à la maîtrise en gestion de l'environnement, plutôt que dans l'objectif de prendre position. J'aurais souligné la vérification interne par les autres ministères et organismes, faite avec un regard critique pour la plupart. Je n'aurais pu faire mieux. J'aurais appuyé l'intervenant de la sécurité civile qui réclamait que soit intégré l'exigence d'un plan de mesure d'urgence dans la directive ministérielle. J'aurais reproché à Hydro-Québec de ne pas avoir suivi la directive en ce qui a trait à la conduite d'un inventaire faunique et floristique, plutôt que de se baser sur un équivalent datant d'il y a près de 10 ans dans le projet Toulnustouc. J'aurais déploré que ne soient pas connues à ce jour les mesures de compensation pour la perte de deux tourbières. Finalement, j'aurais conclu en disant que c'est excitant d'être une citoyenne engagée en ce temps de nombreuses consultations publiques.


Ce que je retire de la soirée, c'est que les Innus semblent avoir une vision élargie des enjeux; il n'est pas question que d'une zone d'étude, mais de tout un territoire. Il n'est pas question d'un poste électrique, mais de l'avenir énergétique du Québec. De plus, je suis persuadée que la commission abordera dans son rapport le fait que la négociation n'a pas semblé avoir lieu entre Hydro-Québec et ses parties prenantes (Abitibi Bowater qui détient des droits forestiers et le MRNF, la chambre de commerce de Manicouagan et les Innus de Pessamit), ou encore que le processus du BAPE est encore mal compris de la population; est-ce que la deuxième audience est le moment de négocier? Peut-être qu'il y aurait dû avoir médiation?

En sortant, il y avait du brouillard et j'ai noté que les représentants d'Hydro-Québec sont montés tous ensemble dans une mini-van (covoiturage power!!! Un morceau de robot!). Leur véhicule m'a suivi pendant un bon moment avant que je les laisse passer à Chute-aux-Outardes. J'ai écouté à la radio pendant ce temps-là: Hey Jude des Beatles, Mother de Pink Floyd, Peace or violence de Stromae et Un jour sur deux de Stefie Shock. Finalement, en rentrant dans Baie-Comeau, ils ont brûlé un feu rouge et se sont arrêté à la Maison du spaghetti.

Aucun commentaire: